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Tout savoir sur le Tapioca

Le dimanche, 26 juin 2022 0

Dans Recettes

Féculent de couleur blanche extraite du manioc (arbuste qui appartient à la famille des euphorbiacées), le tapioca est considéré dans certains pays comme un aliment à part entière et dans d’autres comme un ingrédient mythique en cuisine.  Sa saveur très neutre, ses valeurs nutritionnelles importantes et ses procédés de fabrication font de lui un aliment bon pour la santé qui mérite d’être véritablement connu.
Par L’OEil et la Plume de Gena

Illustration: Tourismo Cameroun

1.    À la découverte du tapioca


Étymologiquement, le mot « tapioca » est emprunté de la langue portugaise. Il vient des langues indigènes amérindiennes Tupi et Guarani, et est constitué de Tipi qui signifie « résidu » et Ok signifiant « pressé ». Entre 1940 et 1946, l’appellation évolue et devient tipiacica, désignant un gâteau de manioc mentionné pour la première fois dans un ouvrage de John Nieuhoff. Fabriqué sous forme de petits grains cristallins semblables à de la semoule, les amérindiens les appelaient « Tipiak », une appellation qui a inspiré le nom de la société française qui commença à produire du tapioca dès le 19ème siècle. Au fil du temps, ce terme donnera naissance à tapioca, un produit qui est devenu très présent dans les tiroirs de la cuisine et dans les assiettes.
Le tapioca a une saveur très discrète et un pouvoir épaississant qui en font un ingrédient très intéressant. Plus intéressant encore sont sa valeur nutritionnelle et son apport dans l’organisme de son consommateur. En effet, le tapioca, par sa grande teneur en glucides complexes apporte à l’organisme de l’énergie et constitue une véritable alternative aux matières grasses pour une prise de poids. Par ailleurs, il est très digeste compte tenu des fibres qu’il contient qui sont bien tolérées et utiles contre la constipation (ces fibres régulent le transit intestinal ave douceur). À la fois très nourrissant et rassasiant, le tapioca est autant consommable par les adultes que par les enfants et même les bébés. Exempt de tout gluten, le tapioca est très indiqué pour les personnes atteintes de la maladie cœliaque.
Pour 100 g de tapioca, nous avons :

  • Des glucides : 86,00 g ;
  • Des lipides : 0,60 g ;
  • Des protides : 1,50 g ;
  • Des calories : 350 kcal
  • Du magnésium, du fer, de la vitamine C et du potassium. 

2.    Le tapioca: un délice des nations

Le tapioca est très présent dans de nombreux pays d’Afrique, d’Asie, d’Europe, et d’Amérique du sud.
Au Cameroun, il est très adulé en milieu universitaire. En effet, rebaptisé « le sauveur », il est consommé par les étudiants sucré ou salé. La référence au terme sauveur vient du fait qu’on y faisait recours soit en temps de galère et de disette car il était alors disponible à bas prix soit alors pour calmer la faim assez rapidement et maintenir l’estomac plein car, au contact de l’eau, il double de volume.  On le consomme très souvent dans ce milieu sucré, en trempant le tapioca dans de l’eau froide, et en y ajoutant du sucre à sa guise, des cacahuètes bouillies ou grillées ou caramélisées et du lait selon son goût.  Il peut est également consommé en repas chaud, frit à de l’huile ou sauté. Dans les régions du Nord-ouest et du Sud-ouest, les populations consomment cet aliment sous forme de « « foufou » accompagné de sauces gluantes ou de légumes. Le coût du tapioca dans les marchés camerounais dépend des saisons mais surtout du flux de manioc, de la demande et de l’offre. En effet, plus il y a du manioc sur le marché, plus il y aura du tapioca ; plus la demande est forte et plus l’offre est moindre et le onéreuse ; le tapioca est beaucoup plus abondant en saison pluvieuse et de ce fait peu couteux qu’en saison sèche. Cette dernière affirmation est due au fait qu’en saison pluvieuse, récolter le manioc est plus aisé car le sol est plus malléable qu’en saison sèche pendant laquelle il est dur. 
Ainsi, en période d’abondance de tapioca, les prix varient dans les marchés entre 1600 Francs CFA et 2000 Francs pour le tapioca de couleur jaune dans une contenance d’un seau de 5 litres ; 1800 Francs et 2500 Francs CFA pour la même contenance de tapioca blanc. Mais en période de pénurie, les prix varient entre 2000 Francs CFA et 2500 pour la même contenance de tapioca jaune ; 2500 Francs et 3000 Francs pour 5 litres de tapioca blanc.
Outre le Cameroun qui fabrique et consomme abondamment le tapioca, de nombreux pays d’Afrique de l’Ouest en ont fait leur aliment de base. En effet, une étude menée au Bénin montre que la consommation du tapioca dans cette partie de l’Afrique de l’Ouest est ancrée dans les habitudes des populations, principalement celles du Nord et du Sud du pays. Cette consommation est estimée à environ 100g par habitant par jour. Ceci correspond à un volume de marché intérieur de  cent quatre-vingt-dix mille tonnes environ. Dans ce pays, l’offre étant très inférieure à la demande, les prix varient entre 200 Francs CFA et 500 Francs CFA par kilogramme.
Appelé Gari au Togo, au Bénin, au Nigéria ainsi qu’en Côte d’Ivoire, il a une saveur légèrement fermenté et son goût est quelque peu aigre. Les populations le consomment après l’avoir reconstitué dans de l’eau bouillie à 100° C. Ensuite, on le laisse reposer pendant au moins cinq minutes et il se transforme en une pâte épaisse appelée Eba dont la saveur est légèrement aigre. On l’accompagne de sauce au choix. 
Le tapioca est également très présent en Amérique du Sud. Péruviens, mexicains, argentins, guyanais, brésiliens, paraguayens et colombiens en font grand usage en cuisine. Au Brésil par exemple, c’est un ingrédient qui sert à épaissir les sauces à l’instar de la féijoada. Il est également utilisé dans la préparation des crêpes salées ou sucrées. Les mexicains quant à eux s’en servent en substitut du riz pour réaliser la recette du riz au lait et font également des chips au tapioca.
En Asie, les chinois confectionnent des plats sucrés ou salés pour leur petit déjeuner avec des perles de tapioca. C’est une pratique très usuelle également en Taiwan où on utilise ces perles de tapioca dans des boissons chaudes ou fraîches ou pour faire des thés variés. Les perles de tapioca sont faites sous plusieurs formes avec des tailles différentes. Une entreprise thaïlandaise produit des assiettes biodégradables à base de tapioca. Par ailleurs, lorsqu’il est re-dissout, il sert également de lubrifiant pour les moteurs de véhicules. Il est à noter que dans ce pays, l’un des plus grands secteurs de transformation alimentaire est celui de la transformation des racines de manioc en tapioca.
Le tapioca est également adulé par les européens à l’instar des français. En effet, il est fabriqué et commercialisé en France pour la première fois par Thomas Groult, propriétaire du Bazar des Pâtes. En 1837, il installe ses bâtiments à Vitry-sur-Seine où se faisait la fabrication de ce produit à base de farine de manioc qu’il importait des Antilles préalablement, puis du Brésil. L’activité autour du tapioca, qu’il s’agisse de sa fabrication et de sa commercialisation, très vite fera la renommée de la famille Groult. En 1967, elle s’associe à la maison Billard pour fonder la société Tipiak.

3.    Fabrication artisanale ou traditionnelle du Tapioca

La fabrication artisanale du tapioca encore appelée fabrication traditionnelle est le procédé fréquent de transformation du manioc brut utilisé par les populations (travailleurs dans ce secteur et ménages) dans les pays en voie de développement ou les pays peu industrialisés. On qualifie également ce procédé de production industrielle rurale.
Le schéma de fabrication du tapioca par ce procédé est le suivant :

 

Tapioca

 

De façon linéaire :

  • Tubercules de manioc : On a préalablement besoin de tubercules de manioc frais récoltés après un cycle de 9 mois à 12 mois. Le choix des tubercules est porté sur ceux qui sont sains et sans blessures. 
  • Épluchage : Ils sont alors épluchés à l’aide d’un couteau propre et débarrassés de la partie centrale très dure et de la nervure du milieu.
  • Lavage : Les tubercules épluchés sont ensuite lavés soigneusement dans de l’eau propre à deux ou trois reprises au moins afin de les débarrasser du sable, des impuretés et de tout autre corps étranger.
  • Râpage : Une fois lavés, on procède au râpage du manioc à l’aide d’une râpeuse en acier inoxydable pour obtenir une pâte lisse et homogène. Il est important au cours de cette étape, d’éviter que la râpure contienne des grumeaux car son aspect lisse et homogène détermine la qualité du tapioca et son coût.
  • Fermentation : Il faut ensuite mettre la pâte de manioc obtenue dans un sac propre et bien le fermer ; le laisser fermenter pendant deux à quatre jours. Le sac doit être disposé dans un endroit sec et sur une surface propre en évitant qu’il entre en contact avec des corps étrangers ou de la poussière/sable qui pourraient souiller la pâte de manioc. Il faut enfin laisser le sac de pâte s’égoutter et se débarrasser au maximum d’eau. La fermentation dure au moins 24heures. Elle pourrait aller à 72 heures au maximum si l’on veut obtenir le goût légèrement aigre du produit. Toutefois, il ne faut pas fermenter une pâte de manioc râpée le jour précédent.
  • Pressage : Il consiste à mettre la pâte après fermentation dans un sac et presser afin de réduire la teneur en eau. Pour faciliter cette action, on pourrait déposer sur le sac contenant la pâte fermentée, une grande meule ou une grosse pierre afin d’y exercer une forte pression. Une fois que ne s’écoule plus de liquide, le pressage prend fin. Il est important de se rassurer que le pressage soit complet au risque d’obtenir des grumeaux lors de a phase de cuisson, ce qui affectera la qualité du produit. La durée du pressage dépendra alors de l’efficacité de l’action et de la teneur en eau de la pâte de manioc. Il est à souligner qu’il faut s’assurer de la solidité du sac utilisé à cet effet afin d’éviter un éclatement de celui-ci au cours du pressage.
  • Émiettage et Tamisage : Emietter délicatement avec des mains propres la pâte de manioc devenue compacte après le pressage (désintégration du tourteau). Il faut ensuite tamiser la semoule obtenue à l’aide d’un tamis en acier inoxydable.
  • Garification  et cuisson: Cette étape consiste à torréfier (passer au feu) la semoule obtenue dans une grande poêle ou une marmite faite en terre cuite, en remuant fréquemment à l’aide d’une spatule en bois, pour que le produit ne brûle pas. La durée de la cuisson dépend de la source de chaleur et de la quantité de produit. Elle peut être de 20 à 30 minutes. L’opération s’achève quand la couleur de la semoule passe de la couleur blanche à la couleur crème et lorsque le produit devient granuleux et craquant au toucher. Au cours de cette phase, si l’on veut obtenir du tapioca jaune, on y ajoutera de l’huile de palme, tout en remuant jusqu’à ce qu’elle adhère au produit. La quantité d’huile dépendra de la couleur que l’on souhaite avoir (claire ou foncée) et de a quantité de la semoule.
  • Refroidissement : Une fois la semoule retirée du feu, il faut la verser dans une bassine sèche de préférence inoxydable puis, l’étaler sur une surface recouverte d’un film polyéthylène ou encore d’une toile dans un endroit sec, propre et loin du sol pour éviter tout contact avec le sable, la poussière et d’autres impuretés. Le produit doit être refroidi à une température ambiante. Le refroidissement peut durer 10 à 15 minutes.
  • Tamisage : Une fois que le produit est refroidi, il faut le tamiser pour obtenir des grains de taille homogène.
  • Emballage/conservation : On peut alors procéder à la phase d’emballage selon les quantités souhaitées. Pour ce qui est de la conservation, le produit, doit être stocké ou conservé dans un endroit sec et propre, dans des bocaux en verre ou en plastiques.

 

4.    Fabrication industrielle du tapioca

Parle de la fabrication industrielle revient à parler d’une production à très grande échelle ou d’une production d’énormes quantités de tapioca. Dans les pays en voie de développement, précisément e Afrique et en Amérique latine, la fabrication industrielle est encore complexe. Ceci est dû au fait que les populations procèdent à la transformation rurale (manuelle) du manioc en tapioca, ce avec du matériel traditionnel, fabriqué par elles-mêmes ou encore la fabrication est faite pour une consommation familiale. Certains fabricants font usage du matériel mécanique, ce qui permet ainsi une activité semi-industrielle de laquelle on obtient des quantités supérieures à celles obtenues de la fabrication traditionnelle ou familiale. Le matériel mécanique est donc constitué d’éplucheuse, de calibreuse, de presse, de tamis et de broyeur. Mais, la fabrication industrielle a été introduite dans ces parties du monde peu à peu.
Au Nigéria par exemple, l’ingénieur Jacob AZUNDAH a mis au point une machine qu’il a baptisé Aevhas. Elle est une machine de transformation des racines de manioc en gari, équipée d’un broyeur et d’un tamis. Le manioc est broyé à l’aide d’un pulvérisateur intégré dans la machine, puis il est décomposé en petites particules recueillies dans une unité de la machine où elles sont ensuite désintégrées et triées. La machine est équipée également de deux modes de chauffage, le charbon et le gaz domestique.
 Aevhas permet d’obtenir plus rapidement la semoule. Ainsi, en 20 minutes soit 12 fois plus vite, le processus de transformation des racines de manioc en tapioca favorise une production plus abondante et renforce par la même occasion la chaîne de valeur dans cette filière.

Transformation alimentaire du manioc, T. Agbor Egbe, A. Braman, D. Griffon, S. Treche, 1985, éditions ORSTOM.
Agence Ecofin.
Viv Afrik, Moctar Ficou, Innovation -Nigeria, 22 février 2021, consultée le 19 février 2022.

 

La rédaction par L’OEil et la Plume de Gena

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